Ouvrage | Romaniser la foi chrétienne ? La poésie latine de l’Antiquité tardive entre tradition classique et inspiration chrétienne

Giampiero Scafoglio , Fabrice Wendling (eds), Collection d'études médiévales de Nice, vol. 20, Brepols, 2022

Source : https://www.brepols.net/products/IS-9782503600871-1

Le présent ouvrage participe aux recherches sur la poésie latine tardo-antique qui s’efforcent de situer et de décrire l’émergence, puis le développement de cette poésie dans le cadre de la christianisation de l’Empire. Tout en situant les auteurs et les œuvres par rapport aux grands changements et aux convulsions idéologiques qui ont traversé la société romaine du IIIe au VIe siècle, les dix contributions de ce volume, réunies par Giampiero Scafoglio et Fabrice Wendling, tentent d’appréhender par le biais de la littérature un phénomène désormais bien étudié par les historiens, celui de la transformation du christianisme dans le contexte constantinien et théodosien d’une religion devenue romaine. Si l’on observe dans la sacralisation des bâtiments et des lieux un processus qui opère une rupture avec la religion spirituelle des premiers siècles, ne peut-on trouver trace d’une telle mutation dans la poésie des IVe et Ve siècles ? Une expression désignant le Christ comme Saluator generis Romulei (Prudence), l’effacement des thématiques chrétiennes dans certains poèmes d’Ausone, l’apparition dans les hymnes de Prudence d’une topographie sacrée, l’éloge hyperbolique de l’art oratoire chez un Ennode de Pavie ou, encore, la stigmatisation de la virginité dans tel Épithalame du même Ennode ne témoignent-ils pas d’une forme de « romanisation » ou – plus exactement peut-être – d’interpretatio romana de la foi chrétienne, d’origine hébraïque ? Autrement dit, symétriquement à la « conversion » de la culture classique dont témoigne la littérature chrétienne, ne peut-on mettre au jour dans les textes poétiques un processus sans doute déconcertant, mais réel, de transformation de la foi, de transmutation de ses contenus originels, sous l’effet d’une poésie chrétienne qui garde des attaches profondes, non seulement avec la poésie classique, mais encore avec tout le « passé » de la civilisation romaine antique, jusque dans ses aspects religieux ?