La Mission Boyuk Kesik (MEAE-CNRS), dirigée depuis 2018 par Giulio Palumbi (CNRS CEPAM), étudie les sociétés et les cultures préhistoriques de l’Holocène en Azerbaïdjan et dans le sud du Caucase.
Les dynamiques de transformation des systèmes socio-économiques, leurs stratégies de subsistance dans le cadre des interactions avec l’environnement, la mobilité des hommes et des troupeaux, le développement des technologies et les modalités d’exploitation des ressources naturelles constituent des thématiques de recherche abordées par l’équipe interdisciplinaire de la Mission Boyuk Kesik.
Première mission française en Azerbaïdjan, la Mission Boyuk Kesik travaille en directe collaboration avec l’Institut d’Archéologie et d’Ethnographie de Bakou.
Les recherches sont concentrées dans la vallée du fleuve Kura.
Pendant dix ans (2005-2015), la fouille des kourganes (tumuli funéraires) de Soyuq Boulaq et ensuite la fouille du site clé de Mentesh Tepe ont permis de faire avancer nos connaissances sur les développements néolithiques, chalcolithiques et du Bronze Ancien de la région.
Les niveaux les plus anciens de Mentesh Tepe, datant de la première moitié du 6e millénaire, ont documenté l’existence d’une communauté néolithique dont les traditions céramiques et architecturales (maisons à plan circulaire) rappellent de près celles de l’horizon culturel de Shulaveri-Shomu Tepe qui s’est développé à cette période tout au long de la vallée du Kura et dans la plaine de l’Ararat.
Les niveaux suivants du Chalcolithique, qui datent du 5e millénaire, témoignent de la première apparition d’une architecture à plan rectangulaire, d’une métallurgie du cuivre très développée ainsi que d’innovations techniques dans la poterie. Ces éléments posent une série de questions sur les changements dans la production artisanale et sur la nature des relations avec la Mésopotamie.
La fouille des kourganes de Soyuq Bulaq contenant un riche mobilier d’objets en cuivre, or et argent ainsi qu’en matériaux exotiques (perles en lapis-lazuli venant d’Afghanistan) et de prestige (sceptre en pierre à tête d’équidé) soulignent l’émergence, au Chalcolithique récent, d’élites sociales fondées sur des formes de contrôle de la production métallurgique et sur des réseaux d’échange à grande distance.
Enfin, le Bronze Ancien est documenté à Mentesh Tepe par deux kourganes. Le plus ancien, datant de la fin du 4ème millénaire contenait des inhumations multiples (39 individus) et un mobilier céramique de tradition Kura-Araxe. Le deuxième kourgane contenait un homme et deux femmes richement dotés de bijoux en métal et un char à quatre roues soulignant l’émergence des nouvelles valeurs liés à la mobilité.
Malgré l’importance des découvertes faites à Mentesh Tepe, plusieurs questions demeurent encore irrésolues et notamment celles sur les origines et les dynamiques de la néolithisation dans la région, puis sur la crise de ces sociétés néolithiques et les modalités de la transition vers les modèles chalcolithiques. Enfin, il reste à appréhender l’émergence de la culture Kura-Araxe et les dynamiques de sédentarisation dans les hauts plateaux par ces dernières communautés.
C’est pour répondre à ces questions que de nouvelles fouilles ont été mises en place en 2017.
À Kiçik Tepe (district de Tovuz) deux niveaux à architecture circulaire datés entre la fin du 7ème et le début du 6ème millénaire témoignent d’un des établissements néolithiques les plus anciens découverts dans la région jusqu’à présent ce qui pourrait fournir de nouvelles donnés et permettre de discourir des dynamiques de néolithisation dans le Sud du Caucase.
En 2018 des opérations sont envisagées à Qaraçinar (district de Goranboy) dans le piémont oriental du Petit Caucase pour enquêter la transition entre les cultures du chalcolithique et du Bronze Ancien (la culture Kura-Araxe) et enfin pour restituer les routes et les stratégies d’approvisionnement en matières premières (obsidienne et cuivre) qui sont abondantes dans les montagnes du Petit Caucase.
