Au cours du Pléistocène, l’Afrique tropicale a connu d’importants changements climatiques en lien avec les variations d’intensité de la mousson Africaine. L’African Humid Period prend place il y a 14 000 à 6000 ans. Cette dénomination caractérise une période de fortes précipitations en Afrique tropicale, bien identifiée par l’étude des pollens et des diatomées et par les nombreux vestiges archéologiques découverts dans cette zone. Les nouveaux outils d’étude géochimique tels que l’isotopie du lithium et de l’hydrogène permettent aujourd’hui, pour la première fois, de quantifier ces précipitations. Ces phases humides surviennent environ tous les 21000 ans sur l’ensemble de l’Afrique tropicale. Cependant, les récentes études de sédiments des lacs africains indiquent que si de grandes phases humides/arides se mettent en place progressivement, des événements brefs, arides à hyperarides, d’environ 100 ans, interviennent également.
Le delta du Nil a bien enregistré dans ses sédiments toutes ces variations hydrologiques, même rapides, avec une résolution décennale. Leur étude nous renseigne indirectement sur le climat passé au sommet de son bassin versant, au niveau des sources du Nil, à quelques milliers de kilomètres de là, dans les hauts plateaux d’Ethiopie. Une panoplie de traceurs géochimiques et organiques a ainsi pu montrer cinq épisodes d’hyperaridité en Ethiopie (il y a 26-24, 18-16, 13-12, 8.2 et 4.2 Ka), coïncidant avec la fonte drastique d’icebergs démantelés de la calotte glaciaire du pôle Nord.
En Ethiopie, la succession de phases humides et arides, voire hyperarides au cours des derniers 25 000 ans a offert des écosystèmes favorables ou défavorables au développement des sociétés. Le projet CLIMAFAR propose de mieux connaître l’évolution de la mousson tropicale et l’impact de ses effets sur les populations en investiguant et en scrutant à haute résolution et de façon pluridisciplinaire les archives sédimentaires (carottages des lacs et étude géomorphologique du paysage) et archéologiques (fouilles et programme de datation des sites) du passé en Ethiopie, c’est à dire au cœur même de la zone de mousson, pour une plus fidèle restitution. Le choix de privilégier, dans la dépression de l’Afar, l’étude du bassin versant du lac Abhé s’est imposé suite à l’identification, dans cette zone d’un grand nombre de sites Late Stone Age (LSA) et néolithiques. La découverte de ces sites méconnus jusqu’alors mais très prometteurs a été réalisée dans le cadre du projet archéologique VAPOR-Afar dirigé par L. Khalidi. Les mécanismes menant à la disparition des populations Late Stone Age (LSA) durant le MIS2 (marine oxygen-isotope stage~20-15 Ka) et à la diffusion tardive des pratiques agro-pastorales en Afrique (entre 4.8 et 3.9 Ka) sont des sujets pertinents pour appréhender l’adaptabilité humaine face aux transformations environnementales, économiques et culturelles, ainsi que le degré d’impact humain sur l’environnement dans les zones arides de la planète.
Partenaires :
CEPAM: Lamya Khalidi, Gourguen Davtian, Louise Purdue et l’équipe VAPOR-Afar
GEOAZUR: Marie Revel, Pierre Brigode, Sébastien Migeon, Carlo Mologni
LOV: Nathalie Vigier
Ethiopian Authority for Research, Conservation and Cultural Heritage (ARCCH)
Afar Bureau of Culture & Tourism
Centre Français des Etudes Ethiopiennes (CFEE)
URL : http://univ-cotedazur.fr/fr/idex/academies/human-societies-ideas-and-environments/contents/projects/climafar-ladaptation-humaine-face-aux-changements-climatiques-dans-les-regions-du-nil-et-de-lafar-de-25-000-ans-a-aujourd2019hui/@@highlight_view#.W3KJcZMzbUJ